jeudi 31 octobre 2013


Le Mont Pelée… en colère
  
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Quand les dieux
Sont en colère
Et le ciel noir
De flammes
Au-dessus de la mer,
Quand le phœnix
Renaît de ses cendres,
S’abattant sur
La terre avec 
Un déluge de feu,
Aucune aile ne
Traverse plus les airs,
Aucune paix ne règne plus.
.
Les  chants se sont tus.
Le silence accable
Cette terre jadis joyeuse.
Alors
S’installent les ténèbres,
Venues d’une lumière
Aveugle,
Creusant la tombe
D’un jour funèbre,
Etouffant son cri
Qui s’évanouit
Comme un fantôme
Apparu au cours
D’un cauchemar…

2


Il laissa une cicatrice
Dans la terre, espérant
Que la sève rencontrera
Une racine profonde,
Pour fleurir l’arbre
D’une nouvelle saison,
Et donner  à l’homme
Une vive raison…

D’espérer…


Le Mont Pelée - Saint Pierre Martinique 

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Le 8 mai 1902, venue d’une éruption monstrueuse, un nuage de poussière épaisse et grise s’abattit sur la ville de Saint Pierre ; Le mont Pelée était en colère… En quelques secondes la vie  prit fin et au fur et à mesure tout fut couvert d’une couche de cendres volcaniques ternissant l’éclat de cette belle nature… obstruant le ciel… balayant le dernier rayon de soleil en le rendant aveugle… et détruisit la ville entière…

La mer même charriait des vagues aux cimes grises s’échouant sur les berges, noyant tous les navires amarrés au port. Le désastre fut tel que rien ne resta épargné à Saint Pierre ; la cathédrale s’effondra lourdement dans une dernière prière, ses tours  basculèrent dans le vide dans un cri d’épouvante… les maisons croulèrent sous la lave lâchée par le Mont Pelée devenu fou, crachant toujours ses monstrueuses bouffées de nuées ardentes et fit couler sa lave  incandescente emportant tout sur son chemin vers la mer, brûlant le Morne Vert et ses magnifique forêts, palmiers, arbres exotiques et  fougères géantes qui avaient poussé au soleil éternel…  dont  ne restaient que des feuilles calcinées.
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La chaleur suffocante déforma les matières… faisant fondre l’œil de verre bienfaisant qui régnait  jadis… La nature fit là une terrible  démonstration de sa force implacable contre  laquelle les hommes restent démunis et impuissants.
Son auréole se leva haut au ciel pour s’abattre lentement, mortellement, sur toutes les âmes de Saint Pierre. Ils furent 30000 mille à périr.

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Au centre de la ville, un seul homme échappa à la mort… ce fut un prisonnier  « incarcéré » dans sa prison minuscule d’épais murs de pierre qui lui sauvèrent la vie… Un miracle presque, un échappé de la mort, un rescapé terrifié à jamais… pire que la prison.
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Le temps passa, l’homme, toujours inlassable quand il s’agit de survivre, reconstruisit sa ville, éleva de nouvelles églises pour prier encore et toujours aux vieux fantômes qui ne lui furent d’aucune aide.
Et il survécut ; il plantait, il bâtissait et revivait, pardonnant même au Mont Pelée sa fureur et s’en alla de nouveau vivre sur ses flancs paradisiaques et traîtres.
Ainsi est l’homme, vivant  avec le danger par atavisme, et le pire des tueurs en colère !
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Un siècle après, Saint Pierre ressemble de nouveau à cette carte postale paisible qu’elle était avant… avant d’avoir vu mourir 30000 hommes, femmes et enfants qui ne demandaient que vivre sur leur belle terre, au milieu d’une nature riche, splendide , sur cette île qu’est la Martinique !

A l’entrée de Saint Pierre, en venant de Carbet,  se dresse, bien en hauteur sur la colline,  une jolie vierge toute blanche…  elle doit surveiller le  Mont Pelée à sa gauche… et protéger les habitants et leur ville !


Jürgen Ehre- St. Pierre 25 juin 2013

mardi 29 octobre 2013

La rosée céleste...





Insouciante,
Sur cette
Branche
Que le vent
Narguera
En vain,
Tu te lançais
Vers la vie
Au rythme des
Battements
De ton cœur
Suspendu…
.
Pendant que
Ses racines
Fouillent
Les
Profondeurs,
S’enfonçant
Dans la terre
Te ressourcer…
La sève montant
Fit jaillir le feu  
De la terre au ciel,
Embrasant
Esprits et âmes
Éplorés…
.
Empruntant
Le chemin
À travers l’arbre
De vie…
Se dépouillant
Et se recouvrant
Sans cesse…
.
La rosée céleste  
Te transmettra
Une parcelle
De l’immortalité.
Les pommes d’or
Auront le goût
De te rêves.
Les racines
Généreront
Ton sang,
Source de vie,
Quand ton âme
Escaladera le ciel
Comme les cimes
Tendent vers la lumière.


Jürgen Ehre 25 juin 2013

lundi 28 octobre 2013

Pluie d’encre...





Pluie d’encre
Vers ton visage.
Te basculant
Au creux de mes
Mains
Avides de toi.
Pluies silencieuses
De poussière.
Et pluies,
Bavardes
Si frivoles.
Il y a tout cela
En toi.
C’est pourquoi
J’y vais chaque jour
Puiser quelques gouttes
De pluie
Au bout de ton âme.



Jürgen Ehre 25 juin 2013


SAINT PIERRELa Perle des Antilles

1



La ville de Saint Pierre, surnommée aussi la Perle des Antilles ou le Petit Paris… blottie dans une baie protégée, entourée d’une verdure somptueuse, était la principale ville de commerce et capitale culturelle à la Martinique. Dans la mer nourricière grouillait encore des poissons, la pêche florissait, et sur cette terre fructueuse les récoltes abondantes enrichissait la ville. On construisait de belles maison au style néocoloniale et ses trottoirs étaient bordés de marbre, OUI ! Inimaginable aujourd’hui ! Une belle et fière cathédrale en hauteur avait vue sur l’horizon… un théâtre de 800 places même où le Tout-Saint-Pierre se pavanait (enfin pas tous !), et le premier tramway hippomobile trottait dans les ruelles pourvues d’un éclairage électrique moderne qu’équipait la ville… déjà en 1900, du jamais vu ! Un jardin  botanique était la fierté de la ville,
D’où on appelait Saint Pierre aussi la Venise tropicale !
Il y régnait, bien sûr, l’esprit du colonialisme hautain et fier au détriment des vrais habitants…
Mais derrière cet apparent bonheur se cacha aussi l’histoire douloureuse et barbare de l’esclavage que nous oublions parfois…. car Saint Pierre pouvait étaler sa richesse grâce à l’industrie sucrière et au commerce des esclaves… qui commença à partir de la période 1641 avec les hollandais. Ce trafic immonde d’êtres humaines qu’est l’esclavage se développa  encore d’une façon hallucinante sous Louis XIV (décision prise à Versailles entre 1671 et 1674 pour favoriser la culture de sucre) le roi soleil… quelle ironie du sort… et vit son apothéose en 1700!
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Ce triste sort, la traite de nègres (30 à 50 millions d’êtres humains réduits en esclavage, torturés, castrés et morts épuisés sous le fouet bienveillant des blancs), n’arrose pas une larme aujourd’hui… les éternelles larmes sont pour d’autres !
Petite Interlude :
Le roi soleil… (sic transit gloria mundi) qui avait croisé en 1669 la veuve Scarron… la Marquise de Maintenon, aux Antilles que l’on nommait «  la belle indienne »  car elle a passé sa jeunesse sur cette île.
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Et la reine Joséphine, cela vous dit quelque chose ?

N’oublions pas une certaine Marie Joséphine Tascher de La Pagerie, dite Joséphine Rose de Beauharnais… qui est née en 1763 aux Trois-îlets en Martinique… elle fut la première épouse de l’empereur Napoléon Ier de 1796 à 1809 et Impératrice de Français, aussi reine d’Italie de 1804 à 1809 !
Il fallait attendre le 27 avril 1848 lors que, grâce à Victor Schœlcher, l’esclavage pris officiellement fin. Nous en reparlerons plus loin…
Revenons à la ville de Saint Pierre de jadis, d’aujourd’hui et demain…
Au port de Saint Pierre somnolaient d’innombrables navires, leurs voiles rentrées, les mâts pointant fièrement dans le bleu d’un ciel immaculé où régnait un soleil éternel. D’autres accostaient sans cesse ou repartaient avec des chargements précieux… un port des plus actifs alors !

De riches plantages  s’aventuraient jusqu’aux  flancs du Mont Pelée qui faisait le guet d’un œil torve au-dessus de la ville… laissant échapper de temps à autre une petite écharpe de fumée joyeuse qui dansait en sortant de sa gueule au rythme des âmes inconscientes de Saint Pierre… avant de s’évanouir dans les airs mouvementés, balayée par un doux vent chaud… et parfumé !

En bas, à Saint Pierre, on mena une vie en grande pompe ; de belles créoles, dans la fraîcheur matinale, sortaient de leurs maisonnettes … à la démarche nonchalante mais fière, ondulant de leurs hanches, leur fichu bigarré sur leur tête, le visage radieux… elles faisaient leur marché en riant. Les békés déambulaient dans les rues, à leurs bras pendaient des dames évaporées portant des dentelles élégantes et raffinées avec coquetterie… aux longues robes blanches à la mode, un petit parasol blanc mignon protégeait leur teint pâle du soleil fougueux. Les hommes, drapés dans leur éternel costume style colon, sûrs de leur prestige et devancés par la fumée de leur cigare, symbole de réussite, paradaient comme des coqs dans ce paradis!
Beaucoup de monde arpentait le port où mouillaient de belles caravelles apportant des marchandises et chargeaient des trésors produits en Martinique ; de la canne à sucre, le fameux rhum, des régimes de bananes, des mangues appétissantes mûries au soleil généreux, et d’autres fruits et légumes furent chargés à bord, un précieux chargement… le tout acheminait vers l’Europe qui languissait de cet exotisme…

La Martinique livrait sa richesse, pour ne pas dire qu’elle fut spoliée et assujettie par les colons qui régnaient !
Donc… la belle vie se résumait plutôt pour eux, les maitres, les vrais habitants de cette île merveilleuse, les Pierrotains, n’étaient plus qu’hôtes sur leur propre terre !

Malgré leur souffrance et le fardeau qu’ils portaient, ils profitaient de tout ce qui venait de l’Europe pour faire de St. Pierre une ville des plus importantes des Antilles, par le commerce bien sûr, et par le prestige ensuite suscitant l’envie des autres îles et villes !

On parlait de Saint Pierre avec… fierté, même le plus humble !

Le Morne rouge et le Morne Vert abritaient des sources naturelles dont on puisait l’eau pour la boire au creux de la main… des fleurs exotiques s’élevaient en exubérance parfumant toute île. Dans cette belle et dense forêt vierge on se sentait très proche d’une création sublime que la nature à jamais donnée à voir à l’homme.

Où il faisait bon de se promener, jeter un coup d’œil sur le port en bas et au-delà jusqu’à l’horizon où se levait chaque matin un de plus beaux soleils pour noyer cette belle île dans une chaleur berceuse… sous ses rayons puissants mûrissaient les fruits… et qu’attendaient des fleurs magnifiques pour s’ouvrir!
Tout concouru ici pour conférer un charme indubitable à Saint Pierre… la perle des Antilles !
Jusqu’au jour, le 8 mai 1902, au matin. Le Mont Pelée, l’ogre omnipuissant, se réveilla de son long sommeil traitre…  et anéantit la ville de Saint Pierre de son souffle funeste…


Jürgen Ehre 25 juin 2013